Jean VOGUET Composer

réflexion

 

 

L’hypothèse des espaces sonores multidimensionnels

EN below
Dans un espace 3D, la variable du temps est indépendante des variables x,y,z à contrario d’un espace-temps 4D où elles sont liées entre elles – par la constante c – et considérées comme nécessaires pour déterminer complètement un phénomène.

Les espaces multidimensionnels (5D, etc.) aux géométries complexes sont silencieux, invisibles et inimaginables avec plusieurs, voir d’innombrables, dimensions déterminées par des vecteurs.

D’après les scientifiques de l’équipe du Blue Brain Project, il existe un univers multidimensionnel dans le cerveau humain. Celui-ci peut créer des structures jusqu'à 11 dimensions mais elles ne sont pas perçues au sens traditionnel car nous ne sommes pas capables actuellement d’imaginer un espace avec plus de 4 dimensions.

Notre cerveau stockant ses souvenirs « peut-être dans une cavité multidimensionnelle » ¹, celle-ci serait de fait un espace latent.

En considérant une porosité probable de ces dimensions, tant dans leurs géométries complexes que par leurs contenus hétérogènes et comme : – Karlheinz Stockhausen qui pensait transformer les humains en êtres polyphoniques capables d’entendre (et de vivre) plusieurs mondes ou plans sonores à la fois ; – Giacinto Scelsi qui écoutait la matière sonore jusqu’à exister en elle, pour qu’elle devienne un milieu où il avait lieu d’être : « Il y a déjà dans ce son-là, tout le cosmos entier qui remplit l’espace. Tous les sons possibles sont contenus en lui. » (Les Anges sont ailleurs … – Arles, Actes Sud – 2006, p77) ;

Il nous sera certainement possible un jour de percevoir jusqu’à l’infinitésimal certains espaces sonores multidimensionnels qu’évoquait déjà Gaston Bachelard ² dans sa conception plurielle d’un espace-temps jamais donné mais toujours à construire comme une superposition d’instants.

« Il faut inventer le cœur des choses, si l’on veut un jour le découvrir. », préconisait Jean-Paul Sartre ³


¹ Selon Henri Markram, directeur du Blue Brain Project et professeur à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne. ² Gaston Bachelard : Voir La Dialectique de la durée – Paris, Boivin – 1936 ³ Jean-Paul Sartre : Voir Situations, 1 – Paris, Gallimard – 1947, L’Homme ligoté

 


The multidimensional sound-space hypothesis

In 3D space, the time variable is independent of the x,y,z variables, in contrast to 4D space-time, where they are linked together – by the constant c – and considered necessary to fully determine a phenomenon.

Multidimensional spaces (5D, etc.) with complex geometries are silent, invisible and unimaginable, with many, even countless, dimensions determined by vectors.

According to the scientists on the Blue Brain Project team, there is a multidimensional universe in the human brain. It can create structures in up to 11 dimensions, but these are not perceived in the traditional sense, as we are currently unable to imagine a space with more than 4 dimensions.

Our brain stores its memories « perhaps in a multidimensional cavity » ¹, which would in fact be a latent space.

Considering the probable porosity of these dimensions, both in their complex geometries and in their heterogeneous contents, and as : – Karlheinz Stockhausen, who thought of transforming humans into polyphonic creatures capable of hearing (and experiencing) several sound worlds or planes at once ; – Giacinto Scelsi, who listened to sound matter to the point of existing within it, so that it became a milieu where he had a place to be : « There is already in this sound, the whole cosmos that fills space. All possible sounds are contained within it. » ;

One day, we will certainly be able to perceive, down to the infinitesimal, certain multi-dimensional sound spaces that Gaston Bachelard ² already evoked in his plural conception of a space-time that is never given, but always to be constructed as a superposition of instants.

« You have to invent the heart of things, if you ever want to discover it. » ³, said Jean-Paul Sartre.


¹ According to Henri Markram, Director of the Blue Brain Project and professor at the l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne. ² Gaston Bachelard : See La Dialectique de la durée – Paris, Boivin – 1936 ³ Jean-Paul Sartre : See Situations, 1 – Paris, Gallimard – 1947, L’Homme ligoté

May 2025

#JeanVoguet #volumiphonie #volumiphony #acousmatique #MusiqueAcousmatique #acousmatic #AcousmaticMusic #MusiqueÉlectronique #ElectroniqueMusic #MusiqueMulticanale #MultichannelMusic #3Daudio #réflexion #concept

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Jean VOGUET Composer Acousmatic Geophonies & Heterotopias – Volumiphony


 

 

Le concept de la Volumiphonie

EN below
Le terme diffusion multicanale s’avère imprécis au regard des possibilités et choix qu’il implique. Car des dispositifs x,y VS x,y,z n’ont pas grand chose en commun tant au niveau compositionnel de l’œuvre que pour son écoute. Dans le premier cas, il s’agit de mesures/distances en 2D et donc d’une pensée et écoute linéaire ; pour le second cas il s’agit de mesures/distances en 3D et donc d’une pensée et écoute volumique.

Historiquement, le multicanal a tout d’abord été développé linéairement : quadriphonie, octophonie, etc. Les recherches se sont ensuite poursuivies sur des espaces volumiques : cube, dôme, etc.

Le 3ème âge ¹ de ce processus – plus que jamais volumique – s’oriente sur la conception d’espaces dits “forêts primaires” à contrario des formats Ambisonics et Atmos ² car heureusement l’espace de nos vies est infiniment plus vaste et beaucoup moins normalisé. Les formations et vibrations des sons dans l’air/espace méritent beaucoup mieux que ces réductions extrêmement limitatives quant à la circulation et à la situation des masses sonores spatiales.

Afin de préciser une terminologie – actuellement trop brouillonne ³ – qui permettrait de mieux définir la métrique spaciotemporelle des masses sonores et du chemin géodésique de chacune d’elles dans son espace-temps courbe, le terme volumiphonie semble le plus adapté pour définir une diffusion multicanale en 3D. Qui plus est, il s’inscrit dans la lignée étymologique de ses prédécesseurs : stéréophonie, octophonie, ambiphonie, etc.


¹ Jean-Marc Duchenne le présente excellemment dans youtu.be/Z1R48MTQE40 ² Ces formatages induisent une perte spatiale ainsi qu’une compression sonore d’où une déprédation significative de la qualité des sons. ³ Laissons la multiphonie au chant choral, d’ailleurs ce terme ne résout en rien les différences entre linéarité et volumique.

 


The concept of Volumiphony

The term multichannel diffusion is imprecise in terms of the possibilities and choices it implies. For x,y VS x,y,z devices have little in common, both in terms of the composition of the work and its listening. In the first case, it's a question of 2D measurements/distances, and therefore of linear thinking and listening ; in the second case, it's a question of 3D measurements/distances, and therefore of volumetric thinking and listening.

Historically, multichannel was first developed linearly : quadraphonic, octophonic and so on. Research then continued into volumetric spaces : cube, dome, etc.

The 3rd age ¹ of this process – more volumetric than ever – is moving towards the design of so-called “primary forest” spaces, as opposed to Ambisonics and Atmos formats ² because fortunately the space of our lives is infinitely more vast and much less standardized. Sound formations and vibrations in air/space deserve much better than these extremely restrictive reductions in the circulation and location of spatial sound masses.

In order to clarify a terminology – currently too muddled ³ – that would better define the spaciotemporal metrics of sound masses and the geodesic path of each of them in its curved space-time, the term volumiphony seems the most appropriate to define 3D multichannel diffusion. What's more, it follows in the etymological footsteps of its predecessors : stereophony, octophony, ambiphony, etc.


¹ Jean-Marc Duchenne presents it excellently in youtu.be/Z1R48MTQE40 ² Such formatting induces spatial loss and sound compression, resulting in a significant loss of sound quality. ³ Let's leave multiphony to choral singing, a term that in no way resolves the differences between linearity and volumic.

January 2025

Text published on the soudingFUTURE website

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Jean VOGUET Composer Acousmatic Geophonies & Heterotopias – Volumiphony


 

 

Mes hypomnémata pour la géophonodésie

Dans un contexte de spatialisation volumétrique, l’espace géophonodésique (mot-valise associant géodésie et géophonie) est constitué des horizontales x & y et de la verticale z .

Verticalement, cet espace géophonodésique se réparti idéalement en 5 étages que nous dénommons sur le dispositif 32.2 du CRANE lab :

5 _________________________ le plein ciel
4 _______________ en l’air
3 ______ à hauteur d’oreille
2 _______________ l’entresol
1 _________________________ le (sous-)sol

Pour que l’espace composé soit finalement identique à l’espace entendu, il faut absolument éviter toute forme de compression (encodage) générée par des algorithmes “standardisant” ¹ à contre pensée des cheminements et trajectoires des masses sonores.

Ainsi pour une meilleure reproduction des espaces composés, nous privilégions la dimension dite “forêt primaire” plutôt qu’un dôme ou cube normalisé et formatisant.

L’une des voies de recherche dans le futur proche sera la conception d’un acousmodrone afin de rendre mobile les points haut-parlants de diffusion. Il permettra une spacialisation volumétrique incroyable des masses sonores (regroupements/densités stationnaires ou se déplaçant, éparpillements, nuées, etc.), ce que ne peuvent pas faire les dispositifs actuels.

Ainsi ces hypomnémata rendront possible l'acte noétique de composer en acousmatique volumétrique.


¹ Les architectures algorithmiques sont extrêmement dangereuses car elles conditionnent et faussent les trajectoires pensées et écrites du compositeur.

January 2025

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Pourquoi je n’utiliserai plus l’IA, cette nouvelle dictature de la commodité.

La curiosité amène à tester les plateformes d’IA générative dédiées à la “création” musicale. Il faut dire que certaines, plus particulièrement stableaudio, sont incroyablement efficaces. Même si celles-ci, destinées plus particulièrement aux “producers” (car cela reste avant tout un outil mis en place pour le musical business), ne semblent pas à priori adaptées à la recherche musicale, elles s’avèrent très performantes quant à générer des matières sonores inouïes. Grosso modo, en très peu de temps d’apprentissage, il devient possible de produire des sons complexes en quelques secondes alors que ceux-ci demanderaient des heures d’élaboration sur les outils habituels de synthèse sonore.

Au-delà de ce “miracle” si tentant se trouve le pourquoi de cet article.

Sans aborder le plagiat induit inéluctablement par le deep learning très actif de ces plateformes, car de toute façon il ne présente aucun “danger” pour des musiques non formatées qui ne font partie d’aucun marché lucratif, il faut cependant porter toute notre attention sur l’aspect énergivore de cette pratique.

Les prévisions actuelles indiquent une multiplication de 4 à 9 fois de la consommation énergétique de l’IA d’ici 2050. Autant dire que la situation est intenable sachant qu’aujourd’hui celle-ci représente déjà une émission de CO2 presque équivalente à celle de l’aviation civile.

Agissant quotidiennement pour limiter mon empreinte carbone ¹ et au même titre que d’avoir toujours refusé de publier mes œuvres sur CD ou 33t ², il m’est impossible éthiquement de valider l’utilisation de l’IA même pour poursuivre des recherches artistiques car il n’est pas acceptable que cela se fasse sur le dos de notre planète.

Il nous faut aussi ne pas oublier les autres méfaits majeurs induits par l’utilisation de l’IA que sont une régression sans précédent des droits & libertés ainsi que la démultiplication des violences du néolibéralisme et de l’État.

Aussi, tout artiste se devrait d’évaluer la faisabilité de chacune de ses utilisations de matériaux, de chacun de ses modes d’action, etc. avec tout ce que cela implique environnementalement et humainement.

De toute façon, les compositeurs et musiciens disposent actuellement d’une telle palette d’hardwares, de logiciels & plugins que l’IA – écocide ³ – n’est vraiment pas fondamentalement nécessaire dans leur processus créatif.


¹ Tout le matériel composant le dispositif 32.2 du CRANE lab a été acquis en seconde main, les enceintes trop gourmandes en énergie ont été remplacées par des plus petites, plus adéquates au volume de l’espace de diffusion. ² La matière des CD se compose de polycarbonate qui libère du BPA (perturbateur endocrinien). Celle des 33t : de polychlorure de vinyle, un vrai poison ! ³ La Quadrature du Net : (…) ces politiques sont dangereuses dans la mesure où, loin de la technologie salvatrice souvent mise en exergue, l’IA accélère au contraire le désastre écologique, amplifie les discriminations et accroît de nombreuses formes de dominations. Le paradigme actuel nous enferme non seulement dans une fuite en avant insoutenable, mais il nous empêche aussi d’inventer une trajectoire politique émancipatrice en phase avec les limites planétaires. (…) laquadrature.net/2024/11/29/cest-pas-de-lia-cest-de-lexploitation-dernier-cri

December 2024

#JeanVoguet #ia #dictature #SynthèseSonore #DeepLearning #TechnoFascisme #réflexion #EmpreinteCarbone

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Jean VOGUET Composer Acousmatic Geophonies & Heterotopias – Volumiphony


 

 

La diffusion multicanale s’avère souvent problématique car plus l’œuvre comporte de canaux, plus elle est difficilement adaptable à moins d’encoder les signaux.

Alors qu’au milieu du vingtième siècle, un grand nombre de compositeurs dé-standardisaient la configuration des orchestres en créant des contextes spécifiques à chacune de leurs œuvres, soixante dix ans plus tard, nous assistons exactement à l’inverse en musique électronique et acousmatique : une normalisation incroyable et malheureuse des dispositifs de diffusion : en dôme, en cube, en ligne tout autour …

La vie n’est pas ainsi faite, ni souhaitable.

Que ce soit en milieux urbains ou dans la nature, la richesse et la diversité des espaces acoustiques rencontrés ne peut être réduite aux seuls cubes, sphères … et toutes autres structures géométriques.

Dans une composition multicanale, la situation des canaux dans l’espace volumétrique faisant sens, le compositeur est souvent confronté à des choix cornéliens face à la complexité et surtout à la diversité des dispositifs existants.

Comment adapter une œuvre conçue pour un dôme à un dispositif style “forêt primaire“ ? Et vice-versa …

November 2024

#JeanVoguet #acousmatique #MusiqueAcousmatique #réflexion #MusiqueMulticanale #3Daudio

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Acousmatique : état des lieux – perspectives

Les genres musicaux novateurs s’éteignent souvent par leur incapacité à évoluer, à s’ouvrir aux recherches en cours, et par l’immobilisme d’un enseignement trop conventionnel, voir sectaire …

Victime de son succès tout relatif et par l’apparition de jeunes générations moulées dans le dogme, l’acousmatique se retrouve actuellement confrontée à son devenir : soit elle se dirige vers une lente extinction, soit elle surpasse certains postulats qui entravent présentement tout processus évolutif.

Tout d’abord il lui faut sortir de cette aberration qu’est “l’interprétation” d’une œuvre déjà interprétée lors de son enregistrement/fixation sur support. Cette prétention est absolument invraisemblable comparée à l’exécution d’une musique instrumentale qui n’existe pas tant qu’il n’y a pas interprétation de sa partition. Et cela ne sera pas facile au regard de tout ce prétendu “académisme” qui promeut cette absurdité via multe-stages & concours.

Ensuite il faut que les acousmates admettent, et ce n’est pas une mince affaire, l’obsolescence de la plupart de leurs outils principaux de diffusion et de mixage. L’acousmonium qui fut – dans les années 70 – une merveilleuse invention se retrouve actuellement dans la même situation que le piano forte face au piano “moderne”.

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Satosphère +Audiodice @ la SAT de Montréal

L’accélération des évolutions technologiques donnant maintenant la possibilité de composer puis diffuser en x, y & z, penser puis réaliser une œuvre acousmatique en x,y aujourd’hui, c’est faire fi de toutes les recherches qui ont été menées depuis des décennies dans les différents instituts de par le monde et c’est surtout nier toute l’importance fondamentale de la situation du son et de sa vibration dans l’espace sachant que celui-ci n’est pas plat.

La définition même de l’acousmatique étant d’entendre le “son-bruit” sans en voir ni connaître la source, une ouverture plus large aux formes d’arts sonores accointantes que sont le field recording, les points d’ouÏes, les parcours sonores, etc. apparaît vivement souhaitable.

Il est grand temps que les compositeurs fassent preuve d’un peu plus d’imagination en évitant de s’en remettre aux seuls acousticiens & ingénieurs du son et leur normation de l’écoute dans l’espace. Car l’immersion, jusqu’à présent, n’a été considérée et expérimentée principalement que dans un seul sens : entourer, en mode cartésien, l’auditeur qui du coup n’a pas d’autre choix que de se situer à la place du prince ¹.

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Il faudrait tout d’abord penser spatialement l’œuvre à composer pour qu’elle puisse être écoutée non seulement en son sein, mais tout autour : en-dessous, au-dessus, derrière, à gauche, au centre, à droite, frontalement, etc. Puis, parallèlement à l’écriture spatiale de la partie musicale, il serait très intéressant de concevoir et d’écrire le parcours de l’auditeur dans l’œuvre et sa durée, pour que celui-ci ne se retrouve jamais dans une zone d’ombre d’écoute et afin qu’il soit toujours positionné au meilleur endroit, à chaque instant du déroulement de l’œuvre.

Tout cela demande de repenser entièrement les lieux de diffusion pour qu’ils deviennent eux-même un parcours en 3D (avec des coursives aériennes, des sous-sols, toutes sortes de méandres et combinatoires qui seraient les bienvenues).

Une musique qui concerne un public restreint et des festivals s’auto-satisfaisant quand ils rassemblent une petite centaine d’auditeurs révèle le gros problème actuel de l’Acousmatique car la médiation nécessaire et les partenariats à établir n’ont pas suffisamment été développés. Hormis les entre-soi “ je t’invite puis tu m’invites “, chacun⋅e se complaît dans sa chapelle et les rares événements dignes de ce nom se déroulent principalement dans les quelques grands instituts existants. Cependant, plusieurs initiatives existent via des communautés, des fédérations de compositeurs, des réseaux telles la CEC, le FeBeME, le réseau inDREAM network, etc.

Mais certainement, le plus grand problème que l’Acousmatique va devoir résoudre, c’est sa soutenabilité, voir son existence même, face à la raréfaction des ressources minières et face à la décroissance obligatoire si l’humanité veut retarder sa disparition anthropique. Comme le définit très bien Thierry Salomon ² avec son concept de la sobriété comme une « intelligence de l’usage » qui distingue quatre leviers d’économies d’énergie : • La sobriété structurelle qui consiste à réorganiser nos activités et l’espace de manière à favoriser des usages peu énergivores. • La sobriété dimensionnelle qui vise à réduire autant que possible la taille de nos équipements. • La sobriété d’usage qui nous invite à modérer l’utilisation desdits équipements. • La sobriété conviviale qui relève d’une logique de mutualisation des équipements et de leur utilisation. L’Acousmatique doit répondre holistiquement, sans se fermer les yeux, et très rapidement en innovant dans les outils (espaces de diffusion, dispositifs haut-parlants, etc.) nécessaires à sa pérénité.


¹ Avec ce genre de dispositif, que ce soit un cube ou un dôme, l'effet optimal n'est accessible qu'à quelques personnes situées au centre et la dégradation de l’écoute augmente à mesure que l'on s'éloigne du centre. Ainsi, seules quelques personne, au mieux quelques dizaines, peuvent assister à une diffusion spacialisée dans de bonnes conditions d’écoute. ² ingénieur énergéticien et vice-président de l’association Négawatt

March 2024

Texte publié dans le n°152 de la Revue TK-21

#JeanVoguet #acousmatique #MusiqueAcousmatique #réflexion #MusiqueMulticanale #3Daudio #soutenabilité #sobriété

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Ma méthodologie acousmatique

L’apparition et l’utilisation quotidienne des outils numériques consacrés aux sons m’a tout naturellement dirigé/amené à la musique acousmatique.

La première étape a été de transcrire mes pratiques instrumentales et compositionnelles dans un environnement numérique où l’écriture musicale ne correspond plus à la réalité sonore. Pour ce faire, il m’a donc fallu déterminer de nouveaux processus de recherche et définir un nouveau alphabet sonore, facilité en cela par l’aisance à mettre au-devant certaines matières sonores sans avoir – comme en musique instrumentale – à tenir compte de leurs capacités ¹.

La plus grande – et remarquable – transformation, fut la possibilité infinie de configurer l’espace du son. Certes j’avais déjà expérimenté la dimension spatiale d’une œuvre dans mon concert d’avions ², puis dans celui de montgolfière ³, mais les dispositifs multicanaux rendent possible des déplacements gigantesques de masses sonores dans l’espace-temps x, y & z avec des durées qui diffèrent selon la longueur, la vitesse et le parcours de celles-ci.


¹ Par exemple : une mandoline dans un fortissimo orchestral sera toujours inaudible. ² Pièce Objetique n°2 – « Airs d'Escadrille » pour 6 avions et 1 sampler (1989) – œuvre créée au Musée de l'Air et de l'Espace du Bourget ³ Pièce Objetique n°3 – « Concertant » – pour 1 montgolfière, 13 instants sonores pré-enregistrés et 3 magnétophones (1990) – œuvre crée à la Fondation D.A.N.A.E. en Picardie.

 

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La communication d’objets sonores via l’intrication (connexion entre-eux) et l’auto-organisation (dans les flux sonores) font partie de mes recherches compositionnelles actuelles qui s’orientent de plus en plus vers l’heuristique à travers l’imagination artificielle : • avec l’utilisation, en design sonore, de générateurs de sons par AI ¹ textuelle ; • par tout l’intérêt que je porte : – aux interfaces neuronales directes IND et le suivi que j’en effectue (en attendant impatiemment qu’elles deviennent opérationnelles) concernant la génération de sons contrôlés par les émotions de l'utilisateur, puis dans quelques années – quand elles seront capables de lire et écrire nos pensées – pour la composition en temps réel ; – et dans une moindre mesure, aux interfaces cerveau-ordinateur ICO pour piloter les outils dans la création sonore.


¹ Tels les logiciels Stable Audio (de Stability AI) et MusicFX (de Google’s MusicLM)

 

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Idéologiquement et quotidiennement, j’agis contre cette société qui nous conduit vers l’extinction humaine en privilégiant – à mon humble mesure – les voix de sa survivance – où comment habiter en commun notre Terre, dans la joie – face à l’effondrement en cours : • en développant – l’eutopie n’existant presque plus – le concept d’hétérotopie acousmatique, me servant pour ce faire de la géophonie  ; • en effectuant un cheminement jalonné d’actes artistiques plutôt que de productions matérielles (CD) ; • en utilisant le “meta-tool” qu’est l’ordinateur, plutôt que des microphones, appareils photos, instruments & outils musicaux hardwares, etc ; • En raréfiant mes déplacements en avion.

Il me faut donc veiller chaque jour à gérer et minimiser l’impact environnemental de mes actes artistiques car ceux-ci ne sont pas qu’immatériels, bien qu’ils nous offrent – avec l’amour – ces seuls hors-temps si vitaux, si sensibles, qui nous permettent de ne pas sombrer dans le plus grand désarroi.


¹ L’eutopie, un concept réaliste d’un lieu agréable et accessible, là où l’utopie désigne un lieu qui n’existe pas. L’hétérotopie, un concept de Michel Foucault, défini comme une localisation physique de l’utopie qui héberge l’imaginaire. ² Ensemble des sons provenant d’éléments abiotiques tels que le vent, l’eau, la pluie, les mouvements du sol, etc.

February 2024

Texte publié dans le n°152 de la Revue TK-21

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Jean VOGUET Composer Acousmatic Geophonies & Heterotopias – Volumiphony